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S.D.F.

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De la burle aux alizés

Saltimbanques Des Flots

Vava’u et Ha’pai

L'arrivée dans l'archipel de Vava'u est fort déconcertante. Alors que nous avons quitté la veille au matin un lagon, nous longeons maintenant un archipel constitué d’ilots de belle hauteur.

Une quarantaine d'îles de trois cents à quatre cents mètres d'altitude sont disposées çà et là, séparées par des bras de mer sinueux. Certaines sont minuscules, ce sont de petits monticules recouverts de végétation. D'autres sont plus grandes et les villages côtiers apparaissent, laissant deviner des ports garnis d'embarcations de pêche et entourés d'une poignée d’habitations aux couleurs bariolées. Pas ou très peu de plages les bordent, un récif les encercle par endroit.

Nous nous rendons sur l'île principale où se trouve la ville de Neiafu, deuxième plus importante agglomération des Tonga. Trente bouées sont installées, elles sont toutes occupées, beaucoup de bateaux en partance pour l'ouest font escale sur cette île.
Les formalités de douane sont vite accomplies, notre entrée principale aux Tonga ayant déjà été faite.
Boutiques, buanderie, restaurants, épiceries, marché de fruits et légumes, rien ne manque dans cette bourgade à première vue assez austère.

Nous n'avons pas encore passé l'anti- méridien, mais les autorités locales ont depuis longtemps choisi, afin de faciliter les échanges commerciaux, de vivre le même jour que les habitants des îles Fidji et de la Nouvelle Zélande.
Si le capitaine utilisait encore le sextant pour la navigation, nous serions un jour sur mer et, au même instant ce serait le lendemain sur la terre... La navigation électronique nous facilite incontestablement la vie !

Nous nous régalons de salades de poulpe sur lit de concombre, de pizzas végétariennes aux carottes et haricots, de porc local grillé au barbecue.

Un dimanche en début d'après-midi, alors que nous sommes tranquillement attablés au restaurant, nous sentons le sol trembler sous nos pieds.
Le brouhaha environnant stoppe immédiatement, un silence total se fait et chacun regarde avec inquiétude autour de lui. Quelqu'un crie en anglais " Earthquake!" mais nous ne connaissons pas encore ce mot!
Les secousses se poursuivent semblant s'éterniser. Nous avons l'impression d'être sur un ponton flottant agité par une forte houle ou secoué par de turbulents garnements. Des trophées de pêche et des sculptures diverses oscillent sur l'étagère, l'écran de télévision semble vouloir se décrocher de son socle, nous n'en menons pas large.
Quelques personnes se lèvent, nous les imitons, sans doute avons- nous tous envie de sauter dans nos annexes mais nous restons comme paralysés et sans énergie aucune.
Petit à petit, les secousses s'estompent puis se calment. Quel soulagement !
Certains avertis consultent de suite un site internet relatant les tremblements de terre en direct. Ils nous informent de la magnitude élevée de 8.2 de celui-ci, dont l'épicentre se trouvait à une centaine de kilomètres de nous mais à plus de quatre cents kilomètres sous terre.
Voilà, nous venons de vivre notre premier tremblement de terre avec une pensée toute particulière pour Paul- Alexis qui, à Tokyo, connait parfaitement les gestes essentiels à accomplir en cas de nécessité.

Nous naviguons entre les îles sur des canaux peu agités et ancrons au bord d'une petite plage. L'île est minuscule une seule famille y vit, mais quelle famille !
David et sa femme ont onze enfants, cinq petits-enfants, les grands sont à l'école en Nouvelle Zélande, les moyens à la capitale et tous les petits sont sur l'île. Deux des filles me la font parcourir de long en large, me montrent comment elles attrapent les crabes de terre, me dénichent des citrons locaux de couleur orange et au fort parfum de produit toilettes.
Patrick et David partent à la pêche à la traîne mais reviennent bredouilles...

L'eau n'est pas très chaude, nous plongeons quand même par deux fois sur une épave de bateau. Les coraux sont magnifiques, de couleurs et de formes nouvelles pour nous, de géantes méduses blanches semblables à des plastiques abandonnés flottent alentour.

Une journée de navigation nous emmène à Pangai, un autre archipel plus au Sud où nous retrouvons avec un plaisir immense les lagons, les plages de sable fin...et le soleil !
Cet archipel, Ha'apai, est lui aussi composé de nombreuses petites îles plates semblables à celles des Tuamotu.
Nous visitons Uovela, une ville sur l'île de Pangai, puis ancrons dans une baie voisine, en face d'un hôtel luxueux.
Des bateaux emmènent chaque jour les touristes à la rencontre des baleines, vraiment  nombreuses dans ces eaux.
Du mouillage, nous les voyons sauter, souffler, les jumelles ne quittent plus la table du cockpit.
Les fonds sous-marins sont colorés mais l'eau froide n'est pas trop engageante, nous sommes tropicalisés et essayons de nous habituer progressivement.

Nous partons ensuite pour la capitale, en naviguant uniquement de jour et en faisant escale dans de magnifiques petites baies, après des slaloms entre des récifs qui demandent au capitaine une grande attention.
Nous profitons sans modération des ballets des baleines. La mer est calme et la très bonne visibilité nous permet d'en apercevoir de tous côtés, leurs souffles et leurs sauts sont visibles à plusieurs centaines de mètres.
Le spectacle est quasi permanent, ce sont des centaines de cétacés qui viennent chaque année dans ces eaux abritées par de nombreux récifs. Sur des fonds de soixante à cent mètres, elles donnent naissance puis élèvent leurs baleineaux.
Il n'est pas aisé de les filmer, mais je fais de mon mieux....

Nous voilà donc à Nuku’alofa, la capitale. Nous jetons l'ancre devant un yacht club en piteux état, devant un petit motu. Nous sommes le seul voilier dans cette baie abritée, quelles surprises nous réserve cette nouvelle escale ?